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France : Railcoop doit reporter son Bordeaux-Lyon de six mois

Photo : pxhere.com

La coopérative Railcoop, qui oeuvre à la réouverture de la liaison Bordeaux-Lyon, aurait des soucis avec les sillons proposés par SNCF Réseau.

Railcoop a récemment annoncé à ses sociétaires le « report de 6 mois du lancement de la ligne voyageurs Bordeaux-Lyon ». Prévue en juin prochain, le lancement de cette liaison serait reporté à l’horaire 2023, qui débute en réalité à la mi-décembre 2022. Le problème tiendrait, selon Railcoop, à l’incapacité de « SNCF Réseau de nous fournir des sillons de qualité en dépit des discussions engagées à ce sujet depuis plus de 18 mois. Sur l’ensemble des demandes de circulation formulées, seules 55% ont été pourvues par SNCF Réseau, sous réserve toutefois que nous financions l’ouverture de postes (pourtant réputés ouverts au moment de la construction du service avec SNCF Réseau…). Le reste des sillons n’est, soit tout simplement pas pourvu, soit partiellement pourvu, avec notamment des couples origine-destination qui diffèrent de notre demande initiale ».

Des licenses et des autorails

Créée le 30 novembre 2019, la coopérative Railcoop venait de recevoir le 14 septembre dernier, presque comme cadeau d’anniversaire pour ses deux ans, sa licence d’entreprise ferroviaire par le ministère de la Transition écologique. Avec son siège social à Figeac, dans le Lot, Railcoop occupe à l’heure actuelle plus de 20 salariés et est soutenu par environ 9.000 sociétaires.

Obtenir une licence d’entreprise ferroviaire est une étape importante pour pouvoir faire rouler des trains de voyageurs sur les lignes SNCF Réseau. « C’est un gros sésame parce que ça garantit pour les voyageurs le sérieux de l’entreprise ferroviaire », explique Dominique Guérée, président (bénévole) du conseil d’administration de Railcoop. Une seconde étape importante consiste à avoir le certificat de sécurité ferroviaire, prévu pour le 10 novembre 2021, et délivré par l’Établissement public de sécurité ferroviaire (EPSF).

La question du matériel roulant pour opérer les trains Bordeaux-Lyon avait semble-t-il été réglée au printemps dernier. La Régio Auvergne-Rhône-Alpes (AURA) annonçait en avril la revente à Railcoop (pour un prix non divulgué), de 9 autorails X72500 ainsi que leur rénovation aux ACC (Ateliers de Construction du Centre) de Clermont-Ferrand. Ces autorails ne circulaient plus depuis 2019 et un raffraîchissement sera certainement nécessaire.

Rouler sur quelles voies ?

Le dernier point épineux est aussi d’obtenir des sillons horaires. Et là, seule SNCF Réseau est compétente. Mais Railcoop s’est heurtée aux réalités du terrain. « A huit mois de l’ouverture prévue, SNCF Réseau ne nous a toujours pas donné de garanties suffisantes pour les horaires de la liaison entre Bordeaux et Lyon », explique Dominique Guerrée. En cause : le personnel ne serait pas assez nombreux pour occuper les postes d’aiguillage donnant accès aux voies uniques peu fréquentées de certaines lignes que veut emprunter Railcoop. Il faudrait recruter de nouveaux agents « SNCF Réseau nous a demandé de participer à ces coûts supplémentaires et notamment à celui de leur formation », ajoute Dominique Guerrée.

On ne répétera jamais toute l’importance de l’infrastructure dans le secteur ferroviaire. L’infrastructure est un point noir du transport ferré européen depuis des décennies. Jadis, les Directions « Infra » de tous les chemins de fer intégrés d’Europe furent perpétuellement les victimes de premier plan des coupes budgétaires décidées au sein des entreprises historiques. On préférait dégarnir le périmètre du réseau et sauver la face en se focalisant sur le matériel roulant. La totalité des réseaux d’Europe paie aujourd’hui les pots cassés de ces politiques implacablement focalisées sur le matériel roulant. La France ne fait évidemment pas exception.

Les contraintes qui ont conduit à repousser des tas de programmes de modernisation des postes d’aiguillages ou de certains éléments de génie civil comme les ponts, aboutissent à la situation que rencontrent Railcoop et, au-delà, aux entreprises de fret ferroviaires qui elles non plus, ne peuvent plus atteindre certaines entreprises clientes à l’écart des grands axes, comme les silos à céréales ou certains parcs industriels. La problématique de la gestion du trafic sur des lignes peu ou moyennement fréquentées pourrait être réglée par le biais de grand poste de signalisation centralisé. Le Benelux l’a fait. Mais cela demande de gros investissements…

Auteur: Frédéric de Kemmeter