Pression Alstom

La Cour suprême de Belgique recommande de suspendre l’accord de 3,4 milliards d’euros entre la SNCB et la CAF

A CAF Civity train, a possible future base model of the SNCB AM30.
A CAF Civity train, a possible future base model of the SNCB AM30.

Le Conseil des auditeurs de l’État belge a conseillé à la plus haute juridiction administrative du pays de suspendre l’accord de 3,4 milliards d’euros passé par la SNCB avec le fabricant espagnol CAF pour l’achat de centaines de nouveaux trains AM30. Cette recommandation fait suite à une plainte très médiatisée de la société française Alstom – qui a une présence locale importante en Belgique – pour avoir été écartée de la procédure d’appel d’offres. Il s’agit d’une recommandation non contraignante, mais la pression politique s’intensifie.

La recommandation a été émise lors d’une audition du Conseil d’État sur la contestation par Alstom du résultat de l’appel d’offres. La VRT NWS a rapporté que l’auditeur s’est rangé à la demande d’Alstom de suspendre la désignation de CAF par la SNCB, ce qui augmente les enjeux de ce qui est devenu l’un des contrats publics les plus litigieux de l’histoire des chemins de fer belges. La décision finale du Conseil d’État, la plus haute juridiction administrative belge, est attendue d’ici une à trois semaines.

Au cœur du litige se trouve la décision de l’entreprise publique SNCB d’attribuer le contrat AM30 – un contrat-cadre de 12 ans portant sur des centaines de nouveaux trains – à CAF, en dépit de l’offre compétitive d’Alstom et de son empreinte économique en Belgique. Alstom, qui emploie environ 1 500 personnes sur les sites de Bruges et de Charleroi, a fait valoir que l’opérateur national n’avait pas correctement pris en compte l’impact local de sa décision.

Toutefois, l’enjeu d’un contrat de matériel roulant aussi important ne se résume pas à des questions de fabrication locale et à une différence de 3 % entre les offres des deux entreprises.

Une réaction féroce de la part d’Alstom

La réaction d’Alstom à la suite de cette mise à l’écart a été rapide et particulièrement publique. Dans une lettre au nouveau ministre belge de la mobilité, Jean-Luc Crucke, et aux dirigeants régionaux, Bernard Belvaux, PDG d’Alstom Benelux, a qualifié le choix de la SNCB de « choquant », soulignant l’écart de prix de 107 millions d’euros entre l’offre de CAF et celle d’Alstom.

« L’AM30 est un investissement public de plus de trois milliards d’euros », a écrit M. Belvaux. « Comment peut-on promouvoir une offre plus chère sans différencier la note globale et avec un impact défavorable sur notre site de production à Bruges et sur l’ensemble de l’industrie ferroviaire belge ?

Il a également appelé à une « réaction politique », soulignant que la décision allait à l’encontre des intérêts de l’emploi et de l’industrie belges. Sa position a suscité la sympathie des hommes politiques et des syndicats, en particulier en Flandre, où se trouve le site de Bruges. Le moment est également intéressant, car la Belgique vient de se doter d’un gouvernement résolument nationaliste.

La SNCB défend son choix

La SNCB n’a pas tardé à réagir vigoureusement aux attaques nativistes, affirmant que la sélection s’est faite dans le respect des règles européennes en matière de marchés publics. Dans une déclaration publique, l’opérateur a affirmé qu’il lui était légalement interdit de favoriser la production locale, une position fondée sur la jurisprudence de l’UE.

La SNCB a fait remarquer que la décision se fondait sur le « meilleur rapport qualité-prix », et pas seulement sur le prix le plus bas. Tout en reconnaissant que l’offre de CAF était plus chère, la société a déclaré qu’elle avait reçu une note légèrement supérieure en raison de critères qualitatifs, notamment les performances techniques et la facilité d’exploitation prévue.

La SNCB insiste sur le fait que l’évaluation a été serrée : « La différence de points entre les trois meilleures offres était minime, ce qui indique le niveau élevé de la concurrence. L’opérateur a également souligné que l’offre de CAF était susceptible de « réduire les difficultés lors de l’exécution du contrat ».

Un contrat sous le feu des critiques

Le contrat AM30 comprend la fourniture de divers trains – des voitures à un étage alimentées par batterie aux rames mixtes – y compris du matériel roulant à un ou deux étages pour les services interurbains, locaux et transfrontaliers. Ces trains devraient circuler sur les lignes intérieures et les itinéraires vers la France, les Pays-Bas, l’Allemagne et le Luxembourg, à des vitesses allant jusqu’à 200 km/h.

Toutefois, l’accord est aujourd’hui entaché d’incertitudes politiques et juridiques. Alors que la SNCB a désigné CAF comme son soumissionnaire privilégié, les négociations finales du contrat sont en cours. Si le Conseil d’État suit l’avis de l’auditeur – ce qui est souvent le cas – le processus pourrait être entièrement interrompu, ce qui donnerait une nouvelle chance à Alstom ou entraînerait un nouvel appel d’offres.

Hier, le ministre belge de la Mobilité, Jean-Luc Crucke , a déclaré qu’ il ne reprochait pas aux administrateurs de la SNCB d’avoir choisi les Espagnols, mais il a affirmé que s’ils avaient inclus dans le cahier des charges une disposition tenant compte de l’empreinte carbone de la construction des trains, la décision aurait apparemment été tout à fait différente. (Par ailleurs, M. Crucke a également rejeté les appels du principal partenaire de la coalition de droite en Belgique, l’Alliance néo-flamande, à vendre une participation de 49 % dans l’entreprise publique).

Un cas de gestion des clients ?

Il est difficile de savoir s’il s’agit réellement d’une question de spécifications techniques. Alstom et CAF peuvent évidemment fournir du matériel roulant de qualité, mais ce qui a peut-être influencé le choix de la SNCB, c’est leur approche différente de la gestion des clients.

Le géant français du rail a récemment fait état d’un carnet de commandes d’un peu moins de 95 milliards d’euros, tandis que celui de CAF s’élève à un peu plus de 14,5 milliards d’euros. Bien que le fabricant espagnol de matériel roulant soit nettement plus petit que son rival tentaculaire, sa taille relative peut être un atout pour les opérateurs ; en effet, elle a permis à CAF d’acquérir la réputation d’être plus orienté vers le client et plus flexible, tant au stade du contrat qu’à celui de la fabrication. Comme l’a dit la SNCB, l’offre de CAF pourrait « réduire les difficultés lors de l’exécution du contrat ».

Il appartenait à la SNCB de décider si cela valait ce qu’Alstom appelle l’écart de prix de 107 millions d’euros – un chiffre qui représente une différence de 3 % entre les offres et que CAF a de toute façon remis en question. Mais si le Conseil d’État déclare l’accord juridiquement invalide, la SNCB devra réexaminer ses options. Et c’est ce qu’Alstom cherchera à faire. Après tout, il y a près de trois milliards et demi d’euros en jeu.

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Cet article a été traduit automatiquement de la langue originale vers le français.

Auteur: Thomas Wintle

Source: RailTech.com