La Belgique n’est pas prête à affronter la concurrence dans le secteur ferroviaire de l’UE

À partir de 2033, la Belgique devra ouvrir ses services ferroviaires nationaux de passagers à la concurrence, ce qui marquera la fin du monopole de l’opérateur national, la SNCB. Cette réforme, imposée par l’Union européenne, exige du gouvernement belge qu’il se prépare à une gestion entièrement nouvelle de son réseau ferroviaire national. Mais jusqu’à présent, les progrès sont au point mort.
Pour les observateurs du reste de l’Europe, le cas de la Belgique devient un exemple à suivre. L’opérateur néerlandais NS, par exemple, est confronté à des pressions similaires. La Commission européenne a remis en question la légalité de l’attribution directe par le gouvernement néerlandais de la principale concession ferroviaire à NS pour la période 2025-2033, estimant qu’elle pourrait enfreindre la législation de l’UE. Si la Cour européenne donne raison à la Commission, le contrat existant pourrait même être déclaré invalide avec effet rétroactif.
La Commission européenne impose une ouverture progressive du marché dans le secteur ferroviaire national, plus récemment par le biais de son quatrième paquet ferroviaire, qui exige des appels d’offres concurrentiels pour les contrats de service public dans les États membres à partir de 2023. Les concessions pouvant durer jusqu’à 10 ans ou plus, certains pays qui les ont attribuées à l’opérateur historique juste avant 2023 sont plus en retard que d’autres dans cette étape de libéralisation.
Si les Pays-Bas n’en sont pas à leur coup d’essai en matière d’appels d’offres pour le transport ferroviaire régional, la Belgique part de zéro : La SNCB est l’unique opérateur. Selon une étude commandée par le Service public fédéral belge (SPF) Mobilité et Transports, même dans des conditions idéales, un délai de quatre ans est nécessaire entre l’annonce d’un appel d’offres et le lancement des opérations. En l’absence d’un travail législatif de base et d’un débat parlementaire sérieux, la Belgique ne prend pas encore beaucoup de mesures pour assurer la transition dans ce territoire inexploré.
Pas de pilote, pas de manuel de jeu
L’une des lacunes les plus frappantes dans la libéralisation de la Belgique est l’absence de projets pilotes. Dans son étude, le SPF Mobilité et Transports a averti que l’acquisition d’expérience par le biais d’appels d’offres à échelle limitée aurait pu aider le gouvernement à adapter la législation et à éviter les écueils. Mais pour ce faire, il faudrait ouvrir le contrat de service public existant avec la SNCB, ce que le gouvernement n’a pas fait, ni même sérieusement envisagé.
Selon le journaliste flamand Nico Callens, la décision de ne pas organiser de lignes pilotes signifie que la Belgique passe à côté de leçons précieuses. « Avant de passer à la concurrence totale, ils auraient dû tâter le terrain », écrit-il. Mais même s’ils commençaient maintenant, il semble peu probable que des vols pilotes significatifs puissent être lancés avant l’échéance de 2033.
Un héritage trop important pour être ignoré
Au-delà des obstacles juridiques et législatifs, il existe un autre défi de taille : la SNCB elle-même. En tant qu’opérateur historique, elle possède la quasi-totalité des actifs nécessaires à l’exploitation du réseau – matériel roulant, dépôts d’entretien, billetteries et une main-d’œuvre nombreuse. Ces actifs ont été financés en grande partie par des fonds publics, et l’opérateur reçoit également d’importantes subventions d’exploitation, qui devraient prendre fin en 2033.
M. Callens note qu’à partir de 2028, la SNCB ne pourra plus engager de personnel statutaire, bien que nombre de ses employés actuels continueront à bénéficier de la protection de la fonction publique. Par ailleurs, sa flotte et son infrastructure ne peuvent pas être simplement mises en sommeil, et les centres d’entretien ne peuvent pas être facilement désactivés. Une solution doit être trouvée pour redistribuer ces ressources humaines et matérielles entre les futurs opérateurs.
Apprendre de l’étranger
L’Allemagne, la France et les Pays-Bas offrent des exemples de la manière dont ces transitions peuvent fonctionner dans la pratique. Le personnel, les trains et les dépôts peuvent être réaffectés ou loués dans des conditions réglementées. Mais, comme le souligne M. Callens, le gouvernement belge doit agir rapidement. Sans changements législatifs urgents, le pays aura du mal à respecter l’échéance de 2033, et l’agitation sociale qui se profile déjà en raison de réformes distinctes des retraites ne fait qu’ajouter de l’eau au moulin.
En bref, alors que la Nouvelle-Zélande et le gouvernement néerlandais font l’objet d’un examen juridique sur la manière dont ils ont géré la libéralisation, la situation de la Belgique pourrait être encore plus précaire. Comme le dit M. Callens, « l’affaire néerlandaise est délicate : « Le cas des Pays-Bas est délicat. Mais les choses peuvent toujours être pires – et la Belgique pourrait le prouver. »
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