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Les trains de nuit : pour une autre manière de voyager

Photo : OBB pressroom:

Quitter Amsterdam le soir et se réveiller à Florence le lendemain. Une expérience vécue par des dizaines de millions de personnes, avec cette magie de quitter un environnement pour en retrouver soudainement un autre tout différent. C’est cela, la magie du train de nuit

Mais depuis les années 2000-2010, ces trains ont été tour à tour supprimés dans tous les pays d’Europe avant que l’opérateur public autrichien ne démontre comment il est possible d’en faire un réseau de très bonne qualité et « presque » rentable.

Et pourtant, jadis

« Le train, déjà un avant-goût du voyage ». Tel était le slogan du train couchettes vers les destinations , ensoleillées. À une époque, c’est à dire au début des années 70, où les autoroutes ne menaient pas encore vers toutes les plages de Méditerranée, le train pouvait encore s’imposer comme l’alternative. C’est la raison qui poussa la SNCB à concevoir des trains spéciaux pour ses vacanciers.

Railtour est une création de 1956, regroupant à l’origine 14 agences de voyage, dont Wagons-lits/Cook et Havas. L’agence était un tour-opérateur organisant des vacances « tout compris » train + hôtel. Elle avait acheté 16 voitures-couchettes en 1967. En 1970, la SNCB entrait dans le capital de l’agence puis Railtour devint une coopérative en 1976.

C’est aussi l’époque où les trains de nuit d’Europe reliaient toutes les grandes villes. Beaucoup partaient par exemple d’Ostende, en correspondance avec les ferries provenant de Grande-Bretagne. Ce trafic s’est fortement contracté dès l’inauguration du tunnel sous la Manche.

Pour les vacances, il existait aussi de nombreux trains autos-couchettes vers le sud, dans lesquels on pouvait emmener son auto que l’on chargeait à bord du train au départ de Schaerbeek.

SNCB_RailtourDe 1972 au début des années 90, la SNCB faisait circuler des trains de nuits vers le sud de l’Europe, dotés d’une voiture-bar disco ! Cette photo d’archive montre le ‘Camino-Azul’, reliant Bruxelles à Port-Bou.

Et puis vinrent les péages ferroviaires

Dans les années 2000, le paysage institutionnel fut considérablement modifié. Tous les chemins de fer d’Europe devinrent des sociétés qui géraient le trafic via des contrats négociés avec l’État. Il fallu alors, chez certains, faire le tri entre les missions de service public et d’autres missions moins essentielles au quotidien des navetteurs.

Mais surtout, chaque train devait dorénavant s’acquitter d’un péage, tant sur le réseau national que sur les réseaux étrangers. De nombreux trains de nuit ont ainsi été arrêtés car il n’était plus possible de couvrir leurs coûts avec les deniers publics nationaux. Le train de nuit est considéré comme un trafic de loisir, et doit donc être exploité de manière commerciale, c’est à dire au minimum à l’équilibre.

Pour la SNCB, il devenait clair que cette nouvelle tarification mettait en péril tous ses trains vers le sud. L’ensemble des trains de nuit au départ de la Belgique s’arrêta dans les années 2002-2003.

Vers 2015, il ne restait pratiquement qu’une poignée de trains de nuit en Europe, principalement autour de l’Autriche, en Scandinavie et dans les pays de l’Est.

Un nouveau souffle avec les ÖBB

En 2015, la Deutsche Bahn décidait d’abandonner ses City Night Line, trains équipés de voitures-lits et de voitures-couchettes. Représentant à peine 4% des trafics, avec 90 millions de ventes annuelles, le groupe allemand disait alors enregistrer une perte de 30 millions d’euros, une justification qui fait débat encore de nos jours quant à sa méthodologie…

Toujours est-il que la flotte allemande des trains de nuit ne resta pas longtemps au chômage. Les ÖBB récupérèrent ce qu’il restait de mieux des CityNightLine allemands et l’intégra dans la flotte destinée à ce qui s’appelait encore le réseau EuroNight.

En décembre 2016, les ÖBB relançait une partie du réseau allemand abandonné sous la marque ‘Nightjet’. La suite est connue. Le succès, des trains « juste à l’équilibre » et un réseau qui ne cesse de s’étendre.

Les ÖBB sont tellement confiants dans la formule qu’ils ont commandé 13 rames Nightjet toutes neuves à Siemens Autriche. Une de ses rames est en cours de test un peu partout en Europe.

Auteur: Frédéric de Kemmeter